Des êtres pensants et sensibles
Qui a déjà eu l’occasion d’observer un peu attentivement le comportement de corvidés, le sait bien : ce sont des oiseaux dotés d’une sensibilité et d’une intelligence remarquables. D’ailleurs, les études scientifiques portant sur leurs capacités cognitives et émotionnelles donnent raison à ceux qui les considèrent comme des êtres sensibles et comme des êtres pensants.
Aujourd’hui, on sait les corvidés aussi performants que les primates du point de vue cognitif, capables d’utiliser des outils ou d’opérations mentales pour atteindre des objectif, ou encore de tenir un raisonnement logico-déductif, de faire des prévisions et d’en tirer les conséquences en adaptant leur comportement. Les corvidés sont aussi doués d’empathie.
En situation naturelle, les corvidés ne sont pas spécialement agressifs. Leur méfiance envers l’humain tendrait à augmenter dans les zones où une forte pression de destruction s’exerce sur eux. Au contraire, il apparaît qu’ils jouent, seul ou entre eux, souvent avec de petits objets et sans autre but semble-t-il que le plaisir qu’ils peuvent en retirer.
Aujourd’hui, les recherches sur les capacités cognitives des corvidés se multiplient et divisent les chercheurs parce que leurs résultats bousculent la Théorie de l’Esprit (theory of mind, ou TOM), censée être l’apanage de l’Homme et l’un des piliers du spécisme.
Ce qui, en eux, les rend si semblables à l’Homme
Que la TOM puisse être partagée par les corvidés, que ceux-ci soient bombardés par des neurobiologistes au sommet de la cognition et même considérés comme plus intelligents que les gorilles, les bonobos ou qu’un petit enfant dérange une partie de la société.
En particulier en France ceux qui tiennent au classement de près de la moitié des espèces de corvidés en « nuisibles » (ESOD désormais, pour Espèces Susceptibles d’Occasionner des Dégâts). Effectivement, comment continuer à persécuter et à tuer par centaines de milliers des êtres si proches, si semblables par l’esprit si ce n’est par l’apparence, de ce que nous sommes ?
Comment continuer à programmer des opérations de destruction, des tirs et le piégeage des adultes en pleine période de reproduction tout en prévoyant que les petits agoniseront dans les nids faute de parents pour les nourrir ? Dilemme : pour tuer des êtres sensibles et pensants, ne faut-il pas soi-même cesser de penser et de s’émouvoir ?
Différemment selon les espèces et au cours de leur cycle de vie, les corvidés sont dans l’ensemble une source d’émerveillement pour qui les observe agir et interagir. On peut décider de les ignorer. Ou décider de les voir et, dans ce cas, forcément, l’envie de les protéger et de les aider vient.
« Crow Life »
Autant de considérations qui sont au fondement de la création et de l’action de Crow Life. Du point de vue de l’association, chacun l’aura compris, la vie de n’importe quel corvidé vaut d’être respectée et toutes les espèces valent que l’on se mobilisent pour elles.
Dans cette double perspective, Crow-Life s’est entourée d’un réseau de chercheurs issus de différentes disciplines et appuie son action tant sur un réseau d’influence que sur une équipe opérationnelle accueillant des bénévoles.
Si un changement de regard sur les corvidés se produisait dans notre société, ce serait probablement parce que par-delà les différences nous aurions enfin pris conscience de ce qui en eux est si semblable à nous. La vie et le statut des espèces persécutées, orphelines de considération, s’en trouveraient alors peut-être améliorés.